Bilan du jour 6
- ensoleillement : 10%
- kilomètres parcourus : 159 km
- charge solaire : 516 Wh
- consommation : 932 Wh (5,86 Wh/km)
- insectes percutés : énormément
- insectes avalés : zéro (quel exploit !)
- insectes dans yeux : 6
- cols montés : 1
- baignade : non… programmée pour le réveil
- nuit sous la tente : oui
- ours aperçus : zéro… mais 2 chevreuils, ça compte ?
Itinéraire
Domaine du Gouverneur – Villars les Dombes – Chalamont – Pont d’Ain – Poncin – col du Cerdon – Port – Nantua – Montanges – Pont des Pierres – Bellegarde sur Valserine – Collonges – Farges – Péron – Thoiry – Gex – Divonne les Bains
Malédiction pour les héliocyclistes
Réveillée aux premières lueurs, je sors orienter les panneaux. Le soleil se lève mais partout des nuages.
Avec nos batteries déchargées, ça s’annonce mal pour avaler les kilomètres.
Sous une épaisse couverture nuageuse, les panneaux ne captent que 30 à 60 Wh contre 220 Wh par fort ensoleillement.
Les nuages qui empêchent les cyclistes de griller au soleil sont les ennemis des héliocyclistes. Ils les contraignent à pédaler plus fort et/ou moins loin… tout le contraire de la promesse de l’assistance électrosolaire.
On ne peut pas se permettre de traîner la patte aujourd’hui car on va retrouver tous les Suntrippers à Divonne Les Bains. On ne veut pas rater la fête!
Braquets déréglés
Depuis ma chute à la descente du Puy Mary, il me faut beaucoup de patience pour passer sur le grand plateau.
Parfois je déraille. Et si, par bonheur (incommensurable), j’atteins le grand plateau, je ne peux pas aller chercher les plus petits pignons.
De bon matin, Nate tente de régler mes braquets mais mon vélo reste capricieux (et Nate agacé)
Itinéraire
Avec les 3 cols franchis la veille, Nate pensait que la journée serait easy… que nenni !
En suivant la trace Vecolo, il y en a pour 165 km : 45 km jusqu’à Poncin (arrivée du jour 2) et 120 km pour la dernière journée de l’étape (avec plus de 1800 m de dénivelé).
On est très à la traîne. Nos batteries sont faibles et on ne charge quasiment rien sous les nuages !
Pour moi, pas le choix, on doit se brancher au secteur.
J’étais la première à vouloir faire du 100% solaire mais la priorité c’est d’arriver à Divonne et on ne peut pas parcourir 165 km sans assistance. L’assistance compense le poids de la remorque chargée et nous aide à monter les côtes.
- Objectif 1 : trouver une boulangerie (c’est bon pour le moral des cyclistes)
- Objectif 2 : recharger les batteries
- Objectif 3 : décider d’un meilleur itinéraire
Arrêt à Villars Les Dombes
On se met en route pour Villars les Dombes et en chemin, on rencontre Antoine, 82 ans, sur son vélo de course. Il nous confie qu’il a un cancer mais qu’il faut continuer à faire ce qui nous plaît. Le vélo lui fait du bien, il en fait presque tous les matins !
A Villars les Dombes, je cherche en vain la bibliothèque et à force de tourner en rond, je change d’idée.
À l’office de tourisme, on interroge Isabelle au sujet de la Via Rhôna qu’elle nous déconseille. Elle nous permet de charger nos batteries et étudie la carte avec nous. Elle est justement originaire de l’Ain et nous suggère un itinéraire moins accidenté.
Isabelle nous parle de la Dombes et de ses 1200 étangs. Incroyable la diversité des paysages que l’on a traversés ces 2 derniers jours…
On ne peut pas attendre 3 heures que nos batteries soient pleines.
Une heure de charge, c’est déjà bien.
Isabelle prend des photos de nous et des vélos devant l’église…
On sait qu’on va rouler à l’économie toute la journée.
Superbes gorges du Cerdon
Juste avant d’entamer la montée du col du Cerdon, on s’arrête au bar en bord de route pour boire un coup et avaler nos sandwiches.
Il y a Daniel, le gérant, et Bruno, un habitué. Ils en ont vu passer d’autres avant nous, notamment Corentin et Laurent à bord de leur tandem vintage. Il y a quelque chose de super sympa dans cette procession de vélos solaires.
On passe un excellent moment avec Daniel et Bruno qui nous racontent la vie locale. Daniel est installé ici depuis 20 ans mais il a vécu dans pas mal de pays depuis qu’il a quitté sa Roumanie natale.
On apprend des tas de trucs sur la Roumanie. On a beau être pressés par le temps, on voyage…
Daniel insiste pour me donner une bouteille de désinfectant « pour quand tu tomberas de l’autre côté ».
Je ne peux pas refuser :-)
Les gorges et le col du Cerdon sont une merveille, avec même des vignes à flanc de coteaux.
Il y a un passage en circulation alternée parce qu’un hélicoptère dépose des matériaux un peu plus haut.
Les agents nous font signe de coller à gauche mais avec le souffle de l’hélico, je me fais presque projeter sur leur véhicule ! Nate pareil.
À l’économie…
On avance au minimum de l’assistance. Dans la montée, le moteur réclame 250 Wh quand j’arrive à monter avec 150 Wh.
Sur la descente, on régénère en freinant /pédalant / freinant. La journée va être longue.
J’appréhende Nantua que je ne connais que par l’autoroute des titans que j’empruntais quand je vivais en Suisse pour prendre l’avion à Lyon. En fait, le relief jusqu’à Nantua est correct… Ouf.
Maintenant, on tourne à gauche vers la Valserine. C’est une montée interminable vers Champfromier.
Je suis ma carte papier mais je n’ai aucune idée des dénivelés.
La vallée est belle mais elle semble monter tout le long.
Changement de programme : on bifurque vers Confort pour rallier Bellegarde sur Valserine et passer par l’est.
On pensait descendre mais atteindre Confort n’est pas de tout repos, on fait encore chauffer les mollets.
On est récompensés par la traversée du Pont des Pierres.
Arrêt pharmacie à Bellegarde pour soigner mes lèvres gercées et se goinfrer de sucreries.
Il est 19h quand on se remet en selle et il reste 45 km jusqu’à Divonne.
Une erreur de parcours, un detour et on est encore plus à la traîne.
Dernière ligne droite
Le moteur a soif et me freine.
Nate m’appelle la tortue.
Vers Farges, ma batterie est complètement déchargée.
Nate insiste pour qu’on permute nos batteries car il a réussi à recharger la sienne au mollet !
Sans lunettes de soleil, les moucherons et autres insectes nous percutent de toutes parts.
6 s’échouent dans les yeux…
Devant moi, 2 chevreuils traversent et l’un d’eux décide de faire demi-tour, il plonge dans les blés avec élégance… j’ai la banane (mais je ferme la bouche à cause des insectes) !
Arrivée à la nuit
Il fait nuit maintenant, la batterie de Nate est vide, la mienne lâche juste après.
Et ça monte jusqu’à Gex.
À plusieurs reprises, j’ai envie de jeter la tente dans un champ au bord de la route (mais il nous faudrait une tente 2 secondes de chez Heptathlon).
C’est vrai, on peut rouler jusqu’à Divonne demain matin.
C’est insupportable de rouler de nuit, j’ai l’impression que les automobilistes roulent plus vite, passent plus près.
Certains font même la course.
On voit moins bien les défauts de la chaussée et on se fait surprendre par des bosses, on évite les trous de peu.
Nate a un très bon éclairage, le mien fatigue.
Il faut qu’il tienne jusqu’au bout !
À Bellegarde, j’ai prévenu l’organisation qu’on continuait mais normalement il n’est pas permis de rouler après 21h.
Je m’attends à ce qu’ils nous stoppent à tout instant…
Et puis, un coup de pédale à la fois, on arrive à Divonne.
Ça descend, on passe devant le casino, dans le centre-ville et on atteint le lac.
Il est 22h15 et on ne trouve pas le groupe. Heureusement, l’équipe photo/vidéo passe par là et nous indique l’accès au campement.
22h30, on papote avec les autres participants encore debout.
Nate est affamé, on grignote du pain aux figues et on se met à la recherche d’un restaurant encore ouvert.
On croise Angélique de l’organisation : elle nous explique qu’il manque 15 personnes ce soir.
Ali et Davide
Un homme est stationné dans sa voiture, vitre ouverte.
On lui demande de nous indiquer un resto.
Il s’appelle Ali, il est Emirati et propose de nous déposer en ville.
Il nous fait une petite visite guidée, nous suggère des restaurants et nous invite à se retrouver pour boire un café le lendemain… mais on sera déjà repartis !
C’est la fin du service pour le restaurant indien indiqué par Ali.
Au restaurant italien, Davide, le propriétaire s’excuse car il est en train de refaire l’électricité donc il a vraiment tout débranché dans la cuisine.
Mais il reste bien 2 mousses au chocolat dans le frigo de la salle…
On s’installe avec lui qui est en train de finir un plat de tiramisu.
Davide nous raconte son installation en France, comment il s’est dépatouillé de ses galères administratives…
Il nous propose de charger nos batteries au restaurant pour les charger sur secteur. On n’aura qu’à lui passer un coup de fil demain matin, il habite à côté.
On n’a pas la force de faire 2 aller-retours entre le lac et le centre-ville.
On prend congé et Davide refuse que l’on paie quoi que ce soit.
On est épuisés et on a très mal aux cuisses. Nate encore plus que moi qui a puisé profond dans ses réserves pour dépanner la tortue. (C’est mon héros, je suis pétrie d’admiration et très reconnaissante. Sans lui, on n’arrivait pas !)
Mais après l’effort arrive le réconfort. Derrière les nuages se cache toujours un soleil radieux. D’ailleurs, il va faire beau demain :-)
Et demain, on va piquer une tête dans le lac puis rouler jusqu’à Chamonix !!
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Vous êtes prêt pour le ST 2020? Nous pourrions peut-être le faire ensemble ? Pourquoi pas !
Salut Pierre,
J’entends Nate dire : « pourquoi pas ?! » Ce serait un grand plaisir de le faire avec toi :)
Plus sérieusement :
1) il nous faudrait plus de capacité de panneaux et de batterie pour survivre plusieurs jours sans soleil…
2) veut-on vraiment passer toute la journée à rouler et avoir moins de temps pour les rencontres, je ne suis pas certaine…
We’ll see!
Perrine, toi la grande voyageuse au long court, tu racontes ton voyage Sun Trip comme une jeune voyageuse dans ses premières découvertes et cela donne un récit bien frais et bien agréable à lire. Moi, vieux grognard cyclo voyageur je prends bien plaisir devant ta prose. Gros bisous.
Merci Paul.
Je ne te cache pas que j’adore cette citation de Marcel Proust :
Je l’ai d’ailleurs déjà cité dans cet article
Et on attend le récit de la nuit mouvementée, non non aucune intrusion dans l’intimité juste un petit incident dont j’attends la narration par Perrine
Ah ah, c’est tout à fait prévu, déjà narré… suspense insoutenable !!
La nuit fut courte pour nous, en effet :-)
Bravo Perrine, Bravo Nate.
Le journée fut longue pour tout le monde…et beaucoup d’autres ont joué la tortue, moi compris.
Voici le récit de ma journée…
J’avais pris 100 km d’avance sur mon programme la veille en étant déjà sur les hauteurs à proximité de Genève (lac Genin) le soir afin d’essayer de rattraper le retard au niveau du challenge des grimpeurs en allant chercher les 200 points du Grand Colombier très au sud du parcours avant de rejoindre tout le monde.
Ce ne fut pas chose aisée, le ciel étant très chargé le matin (bien plus que prévu). Avec une batterie à 20-30% (300-400Wh de réserve), les watts solaires ne rentrant pas vraiment, je fis alors 10 km en direction de Divonne les Bains avant de m’arrêter à une intersection décisive et d’évaluer la situation. J’ai alors fait 180° et pris le risque d’aller jusqu’au pied du grand Colombier sans les Wh où le temps pour le monter.
Sous un ciel chargé en économisant, exploitant toutes les possibilités de régénération et mes propres réserves, le col du grand Colombier fut atteint vers 15H. Il permettait en théorie en récupérant 200 points avec 2 cols intermédiaires de prendre la première place du challenge des grimpeurs. Mais à 15H avec une batterie quasi vide, il restait environ 90 km à parcourir pour rejoindre Divonne-les bains avec une arrivée avant 19H pour valider les points.
Le pédalage fut à nouveau soutenu et continu, la charge de récupération dans les descentes à son optimum tout en pédalant pour compenser une charge solaire très médiocre. 20 km avant Divonne-les-Bains, j’ai eu droit à la coupure batterie. Il fallut 2 heures pour faire les 20 km restant dont des côtes à 10 % qui ont obligé à passer sur le plateau de secours de 39 dents avec un pignon 42 dents. A 4 km/h parfois sur les trottoirs pour ne pas gêner la circulation, j’ai tout monté pour finalement redescendre sur Divonne les bains et arriver à 18h59 au pointage…1 minute avant la limite horaire. Assez marqué physiquement par cette journée de 165Km et 2700m de dénivelé positif, c’est probablement ce jour là qu’une grande partie du challenge c’est joué.
Merci beaucoup Bertrand de partager aussi ta journée.
Ah, la fameuse coupure de batterie !!
Bravo à toi d’être allé au bout. En effet, le challenge du meilleur grimpeur a été relancé par ton coup de maître et c’était un régal de vous voir vous tirer la bourre, Michel, Ralf et toi jusqu’au bout et toujours dans un excellent esprit ;-)
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